Le rôle de la scénographie
La scénographie d’un spectacle ou d’un événement est mise en place par le scénographe qui compose, à l’origine, avec des volumes, des objets, des couleurs, des lumières, et des textures.
Elle commence à être utilisée pendant la Grèce Antique où elle est employée de façon très complexe délimitant l’espace et le jeu des comédiens entre le choeur de scène (l’orchestra), l’arrière-scène (le proskenion) et le mur cachant les coulisses (la skéné). Cette organisation scénographique servait presque toutes les pièces de l’époque. Puis arrive le théâtre romain, très proche du théâtre grec, mais qui était plus fermé et employait plus d’ornements. Mais c’est le théâtre à l’italienne dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle qui va développer et moderniser la scénographie notamment grâce à la perspective, l’utilisation de décor figuratifs par des peintres comme Filippo Brunelleschi, théoricien de la perspective mathématique, et les premiers effets spéciaux. Pendant la période naturaliste, des scénographes comme André Antoine ou Constantin Stanislavski, cherchent à reproduire la réalité le plus fidèlement sur scène pour créer une impression d’immersion dans le quotidien de l’histoire.
Aujourd’hui, la scène est un espace d’expression libre qui n’a pas forcément à représenter l’existant car la scénographie peut également être une métaphore du réel, jouer sur l’abstraction pour amener un surplus de sens. On utilise la scénographie pour créer des espaces qui pourront mettre le corps et le jeu de l’acteur en valeur. La scénographie ne se limite plus au spectacle vivant mais s’étend aujourd’hui aux événements culturels extérieur, aux vitrines, aux showroom…
- L’arrivée du numérique sur scène
La scénographie évoluant avec son temps, le développement des nouvelles technologies a ouvert le spectacle vivant vers une nouvelle ère. Merce Cunningham, danseur et chorégraphe américain en fut l’un des précurseurs : il a créé une véritable révolution dans le monde de la danse en la propulsant du côté de l’art abstrait en utilisant simplement le mouvement comme moyen d’expression. Il participe d’ailleurs à l’élaboration de Danceforms, un logiciel permettant de modéliser des mouvements de danse afin de les agencer par la suite les uns aux autres, de manière complètement aléatoire, et le mettra en place dans Biped (1999), une danse entièrement formée par le logiciel.
Grâce à l’évolution constante des nouvelles technologies, vidéos, mapping, effets sonores et autres s’invitent maintenant sur scène pour créer une toute nouvelle dimension du spectacle.
En faisant se rencontrer l’art vivant et le numérique, une nouvelle relation s’est créée entre les artistes et le public, aboutissant ainsi à de nouvelles expériences.
Une scénographie sur plusieurs fronts
- Un décor animé
Ces nouveaux outils technologiques apportent une plus-value au spectacle vivant, ils permettent d’enrichir les représentations du théâtre, de la danse. Les murs se transforment en écran, en véritable seconde scène : le décor devient ainsi une histoire, un élément de mise en scène à part entière.
Beaucoup de metteurs en scène utilisent le concept de vidéo mapping pour créer des projections sur les murs de la scène mais également sur divers bâtiments. Ils contactent alors des personnes comme David Mathias, directeur artistique/chef de projet chez Cosmo AV, un studio de création parisien spécialisé dans le vidéo mapping. Il nous explique que pour créer un mapping “ce n’est pas créer une vidéo, c’est une toute autre approche” il faut réussir à penser en volume et tenir compte de nombreux paramètres comme le support (bâtiment, écran…), le contexte, la surface de projection, le point de vue des gens… car “la matière première du spectacle c’est d’abord le spectateur”. Parfois, l’intérêt artistique n’est pas toujours lié au projet car tout est déjà posé comme pour le mapping de Star Wars sur la Tour de la terreur de Disneyland Paris, donc l’intérêt est plus technique. Au contraire, les chorégraphes arrivent parfois avec beaucoup d’intentions, d’idées, de références et là le travail créatif est primordial comme pour Zup, un spectacle de projection sur un skatepark. “Le mapping est un maquillage, un costume”, on cherche à destructurer, à mettre en valeur certains éléments du bâtiment ou de la scène. Mais pour David Mathias, quelque soit le projet :
“Le vidéo mapping n’a d’intérêt que s’il est magique”.
Les éléments de décor ne font donc plus barrage sur un plateau et laissent plus de libertés aux acteurs ce qui permet parfois de pousser le spectacle jusqu’à un véritable dialogue entre performer et décor.
- Un scénario qui établit un dialogue entre les acteurs et le décor
Le spectacle s’articule autour du décor et évolue en même temps que celui-ci. Il est une partie prenante de l’histoire et se veut indissociable du spectacle comme du jeu des acteurs. Les scénographes cherchent à donner vie au numérique en créant des environnements immersifs et évolutifs. S’écrit alors un spectacle poétique visuel, porteur d’infinies perspectives d’exploration, comme le travail d’Adrien Mondot et Claire Bardainne pour leur spectacle acrobatique et numérique autour de l’air, Le Mouvement de l’air :
Ce spectacle créa un nouveau dialogue entre le monde de synthèse de la projection numérique et la réalité du corps du danseur jusqu’à ne plus pouvoir distinguer la réalité du monde virtuel : « Nous sommes confrontés sans cesse à l’image, la vidéo, le numérique. Les écrans nous entourent et il n’y a qu’à traverser les grandes capitales de certains pays du monde pour imaginer ce que sera la ville de demain : une forte exposition à l’image qui aujourd’hui fait partie de notre quotidien.” explique Mourad Merzouki, créateur du spectacle Pixel, où corps et images fusionnent pour créer un monde de poésie et de rêve.