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En quoi le roman de fiction influence notre vision de l’IA ? [P1]

En quoi le roman de fiction influence notre vision de l’IA dans notre société ?

Bien qu’elle soit très actuelle, l’Intelligence Artificielle est loin d’être un terme nouveau pour l’Homme. C’est en 1900 que le premier automate est apparu au cinéma, dans le film “Coppelia : La Poupée animée” de Georges Méliès. Depuis, la littérature et le cinéma de fiction n’ont cessé de façonner notre perception et notre rapport à la machine.

Dans cette première partie, allons étudier les différents aspects et niveaux d’intelligence de l’IA.

I – L’IA sous différentes facettes

A – La machine contre l’Homme

1 – L’intelligence forte

La plus grande image que l’on se fait de l’IA est celle d’un être autonome à l’intelligence égale, voire supérieure à celle de l’Homme. On parle ici d’intelligence “forte”, dotée d’une “conscience artificielle”, telle qu’elle est décrite par Alexis Toulet dans son article sur Agora Vox (1). Cette vision est assez néfaste car elle suscite une peur chez l’Homme : celle de se faire remplacer par la machine.

Hal 9000 Stanley Kubrick

HAL 9000, le robot emblématique du film de Stanley Kubrick.

C’est sur ce scénario que s’appuie l’incontournable film de Stanley Kubrick “2001, l’Odyssée de l’espace”, dans lequel une IA prend le contrôle d’un vaisseau initialement aux commandes d’un être humain. C’est ce qu’explique Julien Dupont-Calbo dans son article sur Les Echos.fr (2).

2 – La machine dominatrice

Une autre vision présente dans la littérature de fiction est celle du robot conquérant ayant pris le contrôle de l’Humanité, au point d’asservir l’Homme. L’exemple le plus typique est celui du film “Terminator” de James Cameron, dans lequel un robot assassin (mené par Arnold Schwarzenegger), est chargé de décimer le dernier bastion de l’Humanité.

terminator

Le terrible “Terminator”, à l’apparence démoniaque.

Cette vision, extrêmement pessimiste, est intéressante puisqu’elle s’oppose à l’acceptation des robots au sein de nos sociétés, entretenant nos craintes et nos peurs à leur égard. Elle fait également écho à la loi empirique de Godwin énoncée par Mike Godwin en 1990, qui encourage les réalisateurs à envisager l’IA de la manière la plus extrême possible. C’est sous cet angle que le site “Humanoïdes” traite l’IA, dans son article consacré au cinéma (3).

3 – La machine rebelle

Un autre exemple de machine dangereuse est celle qui se retourne contre son créateur, alors que cette dernière a justement été conçue pour exécuter ses ordres dans un but précis. Une fois de plus, cette vision fait référence à l’Homme et à se perte de contrôle sur la machine, telle qu’elle transparaît dans le film “Metropolis” de Fritz Lang datant de 1927, dans lequel la machine “M” se révolte après avoir été trop exploitée (4).

metropolis

La fameuse machine “M” et son créateur, Rotwang.

Cette façon de percevoir l’IA a parallèlement contribué à la création des 3 lois de la robotique établies par Isaac Asimov en 1942, destinées à garder un contrôle sur chaque robot, de façon à ce que les robots ne s’attaquent jamais à leurs créateurs. Nous verrons ces trois lois plus en détail dans la suite de l’article.

B – La machine au service de l’Homme

1 – Le robot valet

Les robots ne sont pas forcément perçus comme nocifs par l’Homme, bien au contraire. En effet, c’est le cas de la machine “esclave”, dont l’unique but est de servir l’Homme et ses dérives intrinsèques. Par exemple, dans le film d’animation “WALL-E” produit par Pixar en 2008, des robots ont été spécialement fabriqués pour nettoyer la planète polluée par l’Homme à cause de ses déchets liés à la surconsommation.

wall-e

La machine, seule face aux travers de l’Homme.

D’ailleurs, cette délégation entraîne une oisiveté qui peut-être dangereuse pour la santé de l’Homme. Elle est surnommée “syndrome de Wall-e”, expression qui apparaît dans un article du blog “Les éditions des chavonnes” (5), à l’origine de ce néologisme.

C – Le robot anthropomorphe

1 – Le robot qui voulait être humain

La machine ne se rapproche pas de l’Homme uniquement grâce au service qu’elle lui rend, mais aussi grâce aux sentiments qu’elle développe au fil du temps avec lui. C’est le cas de “L’homme bicentenaire” interprété par Robin Williams dans le film de Chris Columbus sorti en 2000, dans lequel ce dernier, un robot domestique, développe des sentiments après avoir été maltraité par l’Homme, en quête d’une humanité très bien décrite dans la critique rédigée par le site Mediashow (6).

l'homme bicentenaire

Un robot enseignant une tâche manuelle à un enfant.

Bien que cette vision pourrait alimenter notre peur de nous faire remplacer, il est néanmoins important de mentionner que la créativité et les sentiments sont ce qu’il y a de plus compliqué à développer au sein d’une IA. C’est le cas par exemple du projet “Magenta” actuellement en cours chez Google, dans lequel une musique de 90 secondes a été créée par un robot et dont le résultat laisse encore une énorme marge de progression (7).

2 – Le clone

Outre les sentiments, certains robots dans la littérature sont semblables aux humains grâce à leur apparence, tout simplement. Cette vision, qui est sans doute la plus anthropomorphique que l’on puisse attribuer aux machines, renvoie au désir intrinsèque de l’Homme de vouloir créer un être qui lui ressemble, sans doute dans le but de vouloir préserver au maximum son espèce.

Blade runner

Répliquant “Rachael”, créée par Eldon Tyrell.

Ce terme de la “réplication” humaine est abordé dans l’article de Sandra Laugier du journal du CNRS (8), dans lequel elle questionne les “critères permettant de distinguer un humain” à travers le film de Ridley Scott de 1982 “Blade Runner”, au sein duquel des androïdes “répliquants” s’infiltrent au sein de la société et deviennent indissociables de l’Homme.

D – Le robot transhumaniste

1 – La machine “outil” comme prolongation de l’individu

Selon cette vision, la machine est conçue comme un simple outil intégré à l’Homme, dont le rôle est de lui faciliter la vie ou voire même de décupler ses facultés. C’est exactement sous cet angle qu’est abordé l’ensemble des films “Iron man”, dans lesquels le milliardaire Tony Stark conçoit des outils nano-technologiques faisant de lui un super-héros, grâce à son argent et à son intelligence.

iron man

Le multi-milliardaire Tony Stark, en pleine manipulation nano-technologique.

D’ailleurs, dans l’article de Jean Bonnenfant publié sur le site “Agorize” (9), ce dernier est comparé au célèbre entrepreneur Elon Musk, qui aurait conçu une armure spécialement destinée à “équiper les GI d’Oncle Sam”. Cela montre à quel point la fiction n’est pas si éloignée de notre réalité.

2 – L’Homme aliéné par la machine

Il faut toutefois côtoyer le transhumanisme avec parcimonie, car certains excès et dérives sont possibles. C’est le cas du mythe de Frankenstein apparu pour la première fois dans le roman de Mary Shelley publié en 1818, dans lequel est relaté la création d’un “être vivant assemblé avec des parties de chairs mortes” doté d’une intelligence et d’une sensibilité, qui se transforme en monstre après avoir avoir été rejeté par son créateur et par la société (10).

Frankenstein

La créature tentant de s’intégrer à la société.

Dans un article publié sur Généthique (11), le transhumanisme est vécu à travers ce mythe comme une transgression, car le science rentre en totale contradiction avec l’Humain. Cette vision est péjorative mais permet néanmoins de mettre l’Homme en garde contre les dangers liés à sa propre “gadgétisation”.

E – Le robot collaboratif

1 – La cohabitation homme/machine

L’une des pensées utopiques diffusée par la littérature de fiction rejoint celle d’une société idéale dans laquelle les machines cohabitent harmonieusement avec l’Homme, qui conserve un certain contrôle. Cette vision est intéressante puisqu’elle est de loin la plus probable et la plus concrète, avec l’expansion de la domotique par exemple.

Real human

Une chaîne de robots, tirée de la série “Real Humans”.

Pour aller plus loin, c’est la série suédoise créée en 2012 par Lars Lundström qui reprend cette idée : Real Humans. Celle-ci dépeint toutes sortes de liens plausibles entre machines et humains, au sein d’une société dans laquelle les robots sont aussi bien considérés comme de “simples objets” que comme “l’avenir de l’humanité”, selon les termes repris par le blog “D-Krypt” (12).

2 – Cobotique et lois de la robotique

Les sociétés décrites par la littérature de fiction et peignant une cohabitation homme/machine ne sont pas toutes aussi utopiques et sont parfois assez borderlines. C’est le cas du film “I, Robot” sorti en 2004 et réalisé par Alex Proyas, dans lequel les frontières entre homme et robot sont si fines que des lois robotiques ont été instaurées en guise de prévention : les trois lois d’Asimov.

Asimov

Le célèbre portrait de l’écrivain Isaac Asimov.

Ces lois sont apparues pour la première fois en 1942, dans la nouvelle de science-fiction “Cercle vicieux” (ou “Runaround” en anglais), écrite par Isaac Asimov. Dans le cas d’”I, Robot,” ces lois n’ont malheureusement pas suffit à éviter une rebellion engendrée par un robot. À travers les nouvelles de l’écrivain, l’idée était de mettre en place un système assurant la fidélité de la machine envers l’Homme, telle qu’elle est expliquée à travers l’article de Jean-Claude Heudin sur “FuturaTech” (13).

F – Le robot protecteur

1 – La machine qui préserve l’Humanité

Cette vision est la plus idéalisée que l’on puisse se faire de la machine puisqu’elle est exposée comme un ange gardien protecteur de l’Humanité. Ce robot évangéliste est repris dans de nombreux films, notamment la série des “Transformers” dont le premier volet est sorti en 2007, et dans lequel des robots extra-terrestres sont censés protéger la planète contre une autre espèce de robots, les “Decepticons” (14). Ici, les “Autobots” (les gentils) sont clairement présentés comme des messis.

Sources :

  1. Intelligence artificielle forte, quatre raisons de douter – https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/intelligence-artificielle-forte-196794
  2. 2001 et l’odyssée de l’ordinateur intelligent – https://www.lesechos.fr/18/08/2015/LesEchos/22003-034-ECH_2001-et-l-odyssee-de-l-ordinateur-intelligent.htm
  3. L’Intelligence artificielle au cinéma – https://humanoides.fr/lintelligence-artificielle-au-cinema/
  4. Wikipédia – https://fr.wikipedia.org/wiki/Metropolis_(film,_1927)
  5. Les dangers de l’intelligence artificielle : le syndrome WALL e – https://leseditionsdeschavonnes.com/2015/02/13/2015-02-les-dangers-de-l-intelligence-artificielle-le-syndrome-wall-e/
  6. https://mediashowbydk.com/2016/05/13/lhomme-bicentenaire/
  7. Écoutez le premier morceau de musique créé par l’intelligence artificielle de Google – http://www.huffingtonpost.fr/2016/06/02/intelligence-artificielle-google-musique-art_n_10254550.html
  8. Blade Runner : peut-on «répliquer» l’humain? – https://lejournal.cnrs.fr/billets/blade-runner-peut-repliquer-lhumain
  9. Transhumanisme : de l’homme réparé à l’homme augmenté – http://business.agorize.com/blog/transhumanisme-de-lhomme-repare-a-lhomme-augmente/
  10. Frankenstein ou le Prométhée moderne – https://fr.wikipedia.org/wiki/Frankenstein_ou_le_Prom%C3%A9th%C3%A9e_moderne
  11. Le mythe de Frankenstein peut-il nous aider à comprendre le transhumanisme ? – http://www.genethique.org/fr/le-mythe-de-frankenstein-peut-il-nous-aider-comprendre-le-transhumanisme-66793.html#.WmDlXnkiFaS
  12. Real Humans : Homme-machine, la colocation qui a de l’avenir – https://dkrypt.deloitte.fr/real-humans-homme-machines-la-colocation-qui-a-de-lavenir/
  13. Les trois lois d’Asimov – https://www.futura-sciences.com/tech/dossiers/robotique-trois-lois-robotique-1836/page/2/
  14. Transformers (film) – https://fr.wikipedia.org/wiki/Transformers_(film)

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